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LES ACCESSOIRES DU

COSTUME et du MOBILIER

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Sterling and Francine Clark Art Institute Library

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LES ACCESSOIRES DU COSTUME ET DU MOBILIER

PI. I

extraite Je l'ouvrage

Dame de qualité se préparant à mettre un collier. Gravure à l'eau-forte du XVIIIe siècle, Gallerie des Modes et Costumes français, à Paris, chez les sieurs Esnaut et Rapilly, 1778-1787 (Collection Maurice Rousseau.)

HENRY RENÉ ^ALLEMAGNE

StRjCHMSTE PJlLÉOCJ&dPHE

LES ACCESSOIRES

du COSTUME

ET

du MOBILIER

DEPUIS LE TREIZIÈME JVSSVUVJWLIEV DV DIXNEVVIÈjME SIÈCLE

TOME I.

Bijouterie , bagues , bracelets, boucles d'oreilles, bijoux en acier <âr enfonte de Berlin , boutons, châtelaines, cachets, pommes de cannes, éventaitj, miroirs, escarcelles érsacs, boites & tabatières , coffrets, luminaire , objets en tôle vernie.

Ouvrage contenant

393

phototypies

Reproduifant

plus de

3.000

documents

A PARIS,

Chez 5 CHEMIT, Libraire,

rue Laffitte.52.

M. CM. XXVIII

Ouvrages du même Auteur

Histoire du Luminaire

1 Vol. in-4° de 700 pages, contenant 500 illustrations dans le texte et 80 planches hors texte imprimées en deux couleurs. Librairie Alph. Picard, Paris, 1891. Epuisé.

Histoire des Jouets

1 Vol. in-4° de 320 pages, contenant 250 illustrations dans le texte et 100 gravures hors texte, dont 50 planches coloriées à l'aquarelle. Librairie Hachette et Cie, Paris, 1902. Epuisé.

Sports et Jeux d'adresse

1 Vol. in-4° de 390 pages, contenant 328 illustrations dans le texte et 100 gravures hors texte, dont

29 planches coloriées à l'aquarelle. Librairie Hachette et C'e, Paris, 1 903. Epuisé.

Récréations et Vasse^Temps

1 Vol. in-4° de 384 pages, contenant 249 illustrations dans le texte et 1 32 gravures hors texte, dont

30 planches coloriées à l'aquarelle. Librairie Hachette et C'c, Paris, 1903. Epuisé.

Les Cartes à jouer du XIVe au XXe siècle

2 Vol. in-4° de 504 et 640 pages. Ouvrage contenant 3.200 reproductions de cartes, dont 956 en couleurs: 12 planches hors texte coloriées à l'aquarelle, 25 phototypies, 1 16 enveloppes illustrées pour jeux de cartes et 340 vignettes et vues diverses. Librairie Hachette et C'e, Pans, 1906.

Epuisé.

T>U KrOraSSan aU VayS deS 'BackhtiarîS (Trois mois de voyage en Perse)

4 Vol. in-4° de 228, 250, 282 et 324 pages, contenant 960 clichés dans le texte et 255 planches hors texte, dont 47 en couleurs. Librairie Hachette et C", Paris, 1911. Epuisé.

La Ferronnerie ancienne

2 Vol. in-4° contenant 415 planches renfermant 4.525 documents du XIIe à la fin du XVIIIe siècle. Librairie J. Schemit, Pans, 1924.

Nota. Les renvois qui se trouvent au bas des pages des « Accessoires du Costume et du Mobilier » se rapportent aux planches de la « Ferronnerie ancienne ».

La très Véridique Histoire de Nette et Tintin Visitant le Village du Jouet

Compte rendu de la Classe XVI à l'Exposition Internationale des Arts décoratifs et industriels modernes de 1925.

I Vol. in-4° contenant, dans le texte, 69 illustrations en couleur par J. VAZQUEZ, hors texte, 49 phototypies renfermées dans une couverture coloriée à l'aquarelle. Librairie J. Schemit, Paris, 1927.

PRÉFACE

Etudier la vie de nos ancêtres, s'informer sur leurs goûts, leurs habi- tudes et leurs plaisirs, se rendre compte de leurs besoins et savoir comment ils se sont ingéniés pour y subvenir, a été la constante préoccupation de l'auteur de ce livre, M. Henry-René D'Allemagne.

Beaucoup de ses présents lecteurs, on n'en saurait douter, connaissent son Histoire du luminaire, son Histoire des jouets, ses Sports et jeux d'adresse, ses Récréations et passe-temps, ses Cartes à jouer, enfin les quatre gros volumes de son Voyage en Perse, qui forment autant de chevrons dont il pourrait, à bon droit, s'enorgueillir, puisque tous ces volumes sont aujourd'hui épuisés et qu'ils se trouvent classés, dans les catalogues des libraires, comme des livres rares et précieux.

Après un repos d'une douzaine d'années, repos rendu obligatoire par la terrible période que nous venons de traverser, M. Henry D'Allemagne a repris sa plume et publie aujourd'hui Les Accessoires du Costume et du Mobi- lier, très complet et très attachant essai sur un des chapitres les plus curieux les plus abondants en révélations et, peut-être aussi, les plus ignorés de l'his- toire des moeurs.

Note de l'éditeur. Les légendes placées au-dessous des planches sont très sommaires et, par suite, souvent incomplètes ; aussi le lecteur est-il prié de consulter le troisième volume renfermant les tables, il y trouvera des renseignements détaillés sur chacun des objets représentés dans les planches des deux premiers volumes.

Nous rappelons, en outre, que les notes placées presque à chaque page au bas du texte se réfèrent à l'ouvrage « La Ferronnerie ancienne, musée Le Secq des Tournelles », 2 volumes in-4°, contenant 415 planches renfermant 4.525 documents du xne à la fin du xvme siècle. Librairie J. Schemit, Paris, 1924.

VI PRÉFACE

Raconter l'histoire des mœurs, c'est raconter l'histoire de la vie des peuples et c'est raconter l'Histoire : on ne comprend bien la grande histoire que lorsque l'on sait la petite histoire les accessoires du costume et du mobilier, qui touchent de très près aux costumes et à la mode, ont une part prépondérante.

« Dis-moi comment tu vis, dis-moi quelle est la parure de ta personne, et dis-moi quel est le décor de ta vie et je te dirai qui tu es»: telle est préci- sément la leçon que, sous une forme particulièrement agréable, nous apporte cette nouvelle et vaste étude de M. Henry D'Allemagne, qu'il a bien voulu nous faire la flatteuse amitié de nous demander de présenter au public. Nous avons saisi avec une joie très vive cette occasion de rendre hommage à son long et immense effort, poursuivi avec une ténacité qui n'a jamais connu de lassitude et avec une conscience scrupuleuse qui l'a soutenu dans ses recherches et qui lui a interdit de se contenter de l'a peu près et de l'hypothèse.

« Le sage n'affirme rien qu'il ne prouve », proclamait une règle de la grammaire latine du vieux Lhomond : l'auteur des Accessoires du Costume et du Mobilier, dont nous allons parler, est ce sage.

La conception et l'évolution d'un livre. Mais avant de cons- tater ce qu'est et ce que contient ce livre d'histoire, il est indispensable d'indiquer quelle est l'histoire de ce livre.

Il convient, tout d'abord, en en exposant l'origine, d'expliquer son titre, Les Accessoires du Costume et du Mobilier, qui, d'après l'auteur, en dit beaucoup trop, du moins dans certains cas, mais, qui, en réalité, est loin, dans la plupart des cas, d'en dire assez.

Ce n'est pas par un pur hasard que M. Henry D'Allemagne a choisi cette désignation pour les matières qui se trouvent réunies dans ce grand travail et dont quelques-unes jurent d'être dans le voisinage de quelques autres avec lesquelles elles semblent, à première vue, n'avoir aucun lien apparent. Ce titre lui a été imposé par la disparate même qu'offre, pour un œil non prévenu, la juxtaposition des matières traitées et que, pour les raisons qui vont être énoncées, il n'a pas été maître de choisir à son gré.

La collection de ferronnerie de M. Le Secq des Tournelles. Tous ceux qui s'intéressent à l'art du passé, ou au passé de l'art, estiment le haut intérêt de l'incomparable collection de pièces en fer forgé assemblée, au prix de plus d'un demi-siècle de recherches, par M. Henri Le Secq des Tournelles, collection commencée par son père et qui, peu à peu, est devenue un Musée de la Ferronnerie unique au monde.

Cette collection, M. Le Secq des Tournelles en avait distrait quelques très belles pièces qui figurèrent à l'Exposition de 1889 dans la section de la

PRÉFACE Vil

Petite Métallurgie, dans celle de la Coutellerie, enfin dans celle du Luminaire, cette dernière organisée par M. Henry D'Allemagne et d'où est sortie son Histoire du luminaire.

A l'Exposition universelle de 1900, M. Le Secq des Tournelles contribua, par des prêts innombrables, à l'établissement des sections rétrospectives, dites expositions centennales, notamment à la nouvelle exposition du Lumi- naire organisée, comme la précédente, par notre auteur. Quand la Grande Foire, le monde entier s'était donné rendez-vous, fut fermée, M. Le Secq des Tournelles réunit de nouveau ses collections qu'il avait su, entre temps, augmenter de pièces nombreuses, et lorsque le Musée des Arts décoratifs, installé au Pavillon de Marsan, au Louvre, ouvrit ses portes, il accepta, sur l'invitation de M. François Garnot, président de l'Union centrale des Arts décoratifs, de les y exposer à titre temporaire; elles y restèrent pen- dant près de vingt années; elles sont depuis quatre ans, cette fois à titre définitif, exposées à Rouen, dans l'ancienne église Saint-Laurent, naguère occupée par le Musée d'Art normand.

Or, M. Henry D'Allemagne est lié par une amitié de quarante ans avec M. Le Secq des Tournelles dont, vers 1882, il avait fait connaissance dans l'échoppe de MM. Forgeron, père et fils, les antiquaires, au nom prédestiné, de l'ancienne rue Taranne, aujourd'hui partie du boulevard Saint-Germain. Sur la demande de la municipalité rouennaise, M. Henry D'Allemagne accepta de rédiger le catalogue de la collection de son vieil ami, son camarade d'explo- ration à travers les boutiques viennent dormir, en attendant qu'un amateur leur rende la vie, les débris du passé. Il assuma avec plaisir cette charge et se mit sans retard à l'ouvrage... qui lui a pris trois ans.

Comment peuvent se transformer les notices d'un catalogue. Il estima qu'une simple et sèche nomenclature des pièces exposées, qui se comptent par centaines, voire par milliers, serait insuffisante pour satisfaire la curiosité du public. L'idée lui vint tout aussitôt de diviser les collections du Musée Le Secq des Tournelles en un certain nombre de classes répondant à autant de catégories d'objets déterminés. Dans son esprit, chacune de ces classes devait comporter une notice, pour ne pas dire une monographie, qui aurait servi en quelque sorte d'introduction au catalogue numérique du sujet traité et présenté. Quand, de l'idée, il a voulu passer à la réalisation, il s'est heurté à des difficultés d'ordre matériel qui l'ont conduit à changer et à élargir son projet primitif. D'autre part, il y a été amené par un scrupule de M. Le Secq des Tournelles, qui révèle à quel point ce collectionneur pousse la conscience. M. Le Secq des Tournelles est de ces hommes qui pensent que rien n'est fait tant qu'il reste quelque chose à faire ; il n'a pas

VIII PRÉFACE

jugé que le classement qu'il avait adopté et la numérotation à laquelle il s'était premièrement arrêté pussent avoir la valeur d'un fait définitivement acquis ; mais, tout au contraire, il a pensé qu'il y pourrait encore apporter, avec le temps, des améliorations et des compléments. Par suite, M. Henry D'Allemagne s'est donc vu obligé d'ajourner indéfiniment la publication du catalogue numérique ; il lui a substitué un catalogue graphique, précédé d'un guide rapide à travers le Musée, catalogue monumental qui ne comporte pas moins de 415 grandes planches comprenant au total la reproduction de 4525 pièces de choix réparties en deux forts volumes : Serrurerie monumentale et Menus ouvrages en fer et en acier.

Qu'allait-il advenir des notices écrites par M. Henry D'Allemagne pour servir respectivement de préfaces aux reproductions des pièces prin- cipales du Musée Le Secq des Tournelles classées par catégories, notices ou préfaces auxquelles, avons-nous dit, il avait travaillé trois années durant ? Il en a fait deux parts, la première, préparée pour le premier volume de planches, Serrurerie monumentale, a été mise de côté par lui et servira à la publication de sa thèse à l'Ecole des Chartes sur 1' « Histoire de la corpo- ration des serruriers », qu'il compte faire paraître dans quelques années. La seconde, correspondant à l'autre volume de planches, Menus ouvrages en fer et en acier, a formé son nouveau livre, Les Accessoires du Costume et du Mobilier.

Si donc le choix des matières traitées par l'auteur peut sembler arbi- traire, la faute en est, non point à lui, mais aux circonstances par quoi il a été dominé, aux conditions dans lesquelles il a travaillé. Du fait de ces circonstances et conditions, il a procédé d'une manière réellement originale, puisqu'elle est exactement le contraire de la méthode communément suivie par tout écrivain faisant œuvre d'érudition et voulant publier un ouvrage pourvu d'une illustration appropriée. Cet écrivain commence, nécessairement, par établir sa documentation ; la documentation réunie, il rédige son texte ; le texte rédigé, il recherche, s'il s'agit d'un ouvrage touchant à l'art, les éléments qui pourraient le plus utilement l'éclairer et l'imager, éléments fournis par les musées, les collections privées, les dépôts d'estampes. Il met, comme il se doit, les bœufs devant la charrue ; M. Henry D'Allemagne, lui, a mis la charrue devant les bœufs : il a, en premier lieu, réuni une illus- tration et ce n'est qu'ensuite qu'il s'est préoccupé d'établir son texte. Mais il est arrivé, inconvénient que devait inévitablement amener l'adoption de cette méthode anormale, que ce texte s'est, en bien des cas, sensiblement éloigné de l'illustration.

D'autre part, il n'a pas toujours été possible à l'auteur, sous peine

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PRÉFACE IX

d'être incomplet, de se borner aux textes ou aux documents se rapportant aux seuls objets en fer forgé. C'est ainsi, par exemple, qu'en ce qui concerne les bijoux, force lui a été d'en étudier l'art et l'industrie pendant le Moyen Age et la Renaissance, pour se laisser conduire tout doucement jusqu'au xvmc siècle, époque sont apparus ceux de fer et d'acier, qui tiennent une place importante dans les collections du Musée rouennais.

Sachant que la collection Le Secq des Tournelles est à l'origine de cet ouvrage, on ne s'étonnera pas de voir revenir si souvent en note des indi- cations se rapportant au Musée de la Ferronnerie pris comme source, combien précieuse ! de références.

Division de l'ouvrage. M. D'Allemagne a divisé son livre en quatre chapitres : la Parure et la Toilette ; Menus objets mobiliers ; Outils, Instruments et Appareils de précision ; la Table et la Cuisine, qui com- prennent, au total, plus de cent articles dont quelques-uns, ceux, entre autres, qui concernent les boucles, les boutons, les éventails, les tabatières, les coffrets, le luminaire, la fonte ouvragée, l'acier travaillé, la tôle vernie, les lunettes et les lorgnettes, les horloges, pendules et montres, les couteaux, constituent, par leur développement, non moins que par leur intérêt, de remarquables monographies rien ne manque.

Sources bibliographiques. M. Henry D'Allemagne, qui a beaucoup lu, comme il a beaucoup vu, pour réunir son information rétrospective, n'a point prétendu s'attribuer le mérite des recherches d'autrui et de toutes les énonciations dont il fait état. Tout au contraire, il cite ses sources avec une loyauté qui l'honore grandement ; il la pousse si loin que, pour chacun des articles qu'il étudie, il dresse en quelque sorte une bibliographie du sujet.

Voici, au surplus, quelques indications générales sur la documentation des Accessoires du Coslume el du Mobilier telle que l'auteur a tenu qu'elle fût, par nous, connue de ses lecteurs.

Il a, en premier lieu, utilisé des renseignements que lui fournissait la belle publication que M. Metman, le distingué conservateur du Musée des Arts décoratifs, a consacrée au métal en général et au fer forgé en parti- culier, publication qui reproduit les principales pièces de la collection Le Secq des Tournelles déposée alors au Pavillon de Marsan, au Louvre.

Il a eu recours, ensuite, pour les objets fabriqués par l'industrie pari- sienne à la fin du Moyen Age, pour le xmc siècle, au Livre des Métiers d'Etienne Boileau, le justement fameux prévôt des Marchands et, pour une époque un peu postérieure à cet autre Livre des Métiers dont l'auteur est appelé, faute d'un nom qui soit le sien, « le maître d'école de Bruges ». Pour

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X PRÉFACE

la période du Moyen Age, encore, et pour celle de la Renaissance, il a utilisé le Glossaire français du Moyen Age, cet admirable « corpus » publié en 1872 par le comte Léon de Laborde, ancien directeur des Archives nationales, ainsi que le Glossaire archéologique commencé en 1887 par le savant collectionneur M. Victor Gay, et du deuxième volume duquel son confrère et ami, M. Henri Stein lui a obligeamment communiqué les bonnes feuilles. Pour la période qui va de la fin du xv siècle à celle du xvme, il s'est servi notamment des ouvrages suivants : Dictionnaire de l' Architecture et Dictionnaire du Mobilier, de Viollet-le-Duc ; Dictionnaire du Mobilier, d'Henry llavard ; le Livre des Collectionneurs, de M. Maze-Gensier ; La Coutellerie, de M. Pages ; La Collec- tion Soltykoff, de M Louis Dubois ; Histoire des Arts industriels, de M. Labarte; Lorgnettes et Lunettes, de Mme Heymann ; Les Eventails, de M. Octave Uzanne ; Le Vieux-Neuf et Variétés historiques, d'Edouard Fournier, le très remarquable ouvrage de M. Henri Vever sur la bijouterie du xixe siècle. Pour la seconde moitié du xvme siècle et la première du xix°, sur laquelle se clôt son étude, il a tiré parti des journaux du temps. Enfin, l'ami- cale communication que M. Gélis, l'érudit horloger, lui a faite de VAlma- nach général des marchands pour 1772 et des Catalogues et Rapports des expositions des Produits de l'industrie française de 1819 et de 1823, lui a fourni des précisions sur la fabrication et les fabricants du moment.

Illustration. La division qu'il avait faire de ses notes et l'exten- sion donnée à son travail ont conduit M. Henry D'Allemagne à rechercher une illustration complémentaire pour tous les objets dont l'équivalent ne se trouvait pas dans les collections de M. Le Secq des Tournelles et qui, cependant, devaient figurer dans Les Accessoires du Costume et du Mobilier, de façon à rétablir l'équilibre entre le texte et les reproductions graphiques.

Cette illustration des Accessoires du Costume et du Mobilier est d'une richesse et d'une variété dont on reste confondu. Elle complète à merveille le texte, lui-même si riche et qui porte sur une si grande diversité d'articles. L'auteur l'a composée avec le soin constant de renseigner le plus parfaitement et le plus exactement possible son lecteur, mettant à profit les éléments que pouvaient lui fournir les Archives des Monuments Historiques, les livres et les musées, ses collections personnelles, celles de son ami, M. Le Secq des Tournelles, celles de son autre ami, le Dr Albert Figdor, de Vienne (Autriche), qui a réuni l'ensemble le plus vaste qui soit d'objets usuels et familiers pouvant aider à suivre à travers les âges l'histoire de la vie, des mœurs et de la mode, celles aussi de M. F. Doistau. Tout récemment encore, il retour- nait à Vienne pour y faire photographier chez M. Albert Figdor certaines

l'HEFACE

XI

pièces dont il lui semblait que la reproduction viendrait, fort à propos, joindre l'image à la description.

Un grand amateur : le Dr Albert Figdor. M. Figdor a bien voulu mettre entièrement à la disposition de M. Henry D'Allemagne, avec qui il est lié par trente-cinq années d'affectueuses relations, sa magnifique collection de documents sur la vie civile au Moyen Age et à la Renaissance en Occident. Il fut autrefois un des premiers banquiers de Vienne ; en ce temps-là, il y a quarante ou cinquante ans, les pièces anciennes, même les plus belles et les plus rares, étaient loin d'avoir la valeur marchande qu'elles ont prise aujourd'hui, il n'hésitait pas à immobiliser des sommes consi- dérables, surtout pour l'époque, afin de s'assurer la possession d'objets qui lui paraissaient présenter un intérêt réel pour l'histoire des mœurs.

Tous ses achats ont été faits avec le goût le plus sûr et un discernement qui ne se trompe pas. Le moindre doute survenant par la suite touchant l'un des objets qu'il possède entraîne immédiatement son retrait de la série il lui avait donné place. Gomme il le disait lui-même à M. Henry D'Alle- magne, ce n'est pas une collection pour Américains qu'il a voulu composer, mais un ensemble de documents pouvant servir à tous ceux qui s'intéressent à la vie d'autrefois. A ceux-là, il ouvre volontiers sa maison, surtout s'ils sont Français : il aime, en effet, profondément la France qu'il connaît bien et dont il parle admirablement la langue. Accueillant et libéral, il fait gra- cieusement à ses hôtes les honneurs de sa demeure et des trésors qu'il y a assemblés, mais s'il s'aperçoit que ces visiteurs sont venus chez lui par simple distraction ou dans l'espoir d'y voir des pièces d'un genre un peu frivole ou léger, il sait, courtoisement, mais avec fermeté, leur faire comprendre qu'ils se sont trompés de porte.

Enumérer toutes les séries d'objets qu'il a constituées, ce serait vouloir exposer l'histoire des arts que nous appelons industriels ou appliqués du Moyen Age et de la Renaissance. Nous citerons seulement ses collections de bijoux, bagues, ceintures, menus instruments qu'on portait sur soi, tels que « furgettes » (cure-dents), tablettes de cire, calendriers, couteaux de poche, pendentifs ou pend-à-col, plaques et ornements de coiffure...

C'est lui qui a acheté le célèbre « flabellum » (éventail) du xve siècle, de la collection Spitzer. Cet appareil, en bois sculpté, est, nous apprend M. Henry D'Allemagne, formé d'une longue poignée ouvragée qui donne naissance à une colonne supportant, sur son chapiteau, deux statuettes de saints personnages dans des niches superposées ; la feuille, en parchemin, est décorée d'une vignette or et bleu représentant des feuilles et des pampres de vigne.

XI] PRÉFACE

Le Dr Figdor possède, entre autres pièces historiques ou curieuses, le peigne d'Anne de Bretagne, la marotte d'un fou de la Cour d'un roi de France, des peignes liturgiques, des capsules d'identité que les chevaliers du Moyen Age portaient sur eux pour être reconnus s'ils tombaient sur le champ de bataille, comme, pendant la Grande Guerre, nos soldats fixaient à leur poignet un bracelet retenant une plaque d'identité.

Cette collection, justement célèbre, a paru au Gouvernement autrichien avoir tant de valeur, qu'il a, en ces dernières années, fait voter une loi décla- rant « monument historique » la collection du Dr Albert Figdor et lui interdi- sant soit de la faire sortir d'Autriche, soit de l'aliéner partiellement. Comme abus de pouvoir et violation du droit de propriété, il serait difficile de trouver mieux, même en notre temps, le sentiment du « mien » et du « tien » tend de plus en plus à se perdre.

Un bienfaiteur de nos musées nationaux : M. F. Doistau. M. Henry D'Allemagne a largement puisé aussi, pour l'illustration de son livre, dans les collections de M. F. Doistau.

11 est superflu de rappeler que M. Doistau, membre du Conseil de l'Union centrale des Arts décoratifs, a puissamment contribué, par ses dons éclairés, à l'enrichissement de ce grand musée. Il a, en outre, donné au Musée du Louvre, il y a quelques années, une collection de boîtes, de tabatières et de miniatures de tout premier ordre, enrichies de pierres précieuses, qui constitue un ensemble absolument unique en son genre.

M. Doistau a libéralement ouvert à M. Henry D'Allemagne ses vitrines, pour lui permettre de compléter sa documentation graphique et l'auteur le remercie très vivement de l'aide précieuse qu'il lui a ainsi apportée.

Le magasin du « Petit Dunkerque » tenu par Granchez. M. Henry D'Allemagne, voulant ne négliger aucune source d'information rétrospec- tive, a eu l'idée, idée excellente, de dépouiller les collections de vieux jour- naux pour y recueillir des indications directes sur l'objet de son étude. Il n'a point regretté et ses lecteurs ne regretteront pas non plus la peine qu'il a prise et le temps qu'il a employé à cette recherche, car il lui a de nom- breuses et très instructives trouvailles.

C'est ainsi que le Mercure de France et le Cabinet des Modes lui ont fourni des renseignements circonstanciés sur les articles qu'offrait, à la clien- tèle élégante et riche, Granchez qui, dans les dernières années du règne de Louis XV et sous Louis XVI, tenait, à l'enseigne du « Petit Dunkerque », quai Conti, à la descente du Pont-Neuf, « le grand magasin curieux de mar- chandises françaises et étrangères en tout ce que les arts produisent de plus nouveau », ainsi que disait sa carte de commerce. Ce Granchez était un

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PRÉFACE XI II

homme habile, qui comprenait l'utilité de la réclame et savait la manière de s'en servir. Par les almanachs et les journaux, il mettait le public au courant des nouveautés qu'il avait reçues et de leur prix, se recommandait à lui de sa qualité de fournisseur de la Reine et vantait sans fausse modestie sa marchandise. Le proverbe dit : « A bon vin, pas d'enseigne », mais non : « A bon vin, pas de publicité ». Les mots « réclame » et « publicité » sont de nos jours, mais la chose a existé de tout temps et, sous le nom d' « avis » ou d' « annonce », elle avait sa place dans la presse de l'Ancien Régime.

Sébastien Mercier, dans son Tableau de Paris, a fait du propriétaire du « Petit Dunkerque » un portrait flatteur, sinon flatté, qu'on ne pourrait pas affirmer qu'il a peint sans dessein d'en retirer quelque profit personnel. Ce portrait, d'ailleurs, mérite d'être pris en considération, eu égard au rôle joué par Granchez dans le commerce de luxe, au déclin de la Monarchie, et même dans le commerce en général, s'il est vrai, comme il semble, que le système de la vente à prix fixe qui devait être l'une des causes du succès des grands magasins de nouveautés soit une idée qui lui ait appartenu en propre :

« Le "Petit Dunkerque", écrivait Sébastien Mercier, étincelle de tous ces bijoux frivoles que l'opulence paie, que la fatuité convoite... De nombreux tiroirs sont remplis de mille bagatelles le génie de la frivolité a épuisé ses formes et ses couleurs. Le prix de la façon vaut dix fois le prix de la matière... Chez lui, le prix des bijoux est fixe et invariable ; et si la rivalité fait dire aux autres marchands qu'on paie le double au « Petit Dunkerque », c'est la jalousie qui parle. La grâce et le fini des bijoux ne les rendent pas plus chers qu'ailleurs... »

Gratuite ou payée, cette annonce était bien faite pour attirer vers le « Petit Dunkerque » ceux que Sébastien Mercier appelait « nos petits sei- gneurs », les amateurs des « enfantillages de l'industrie délicate », ainsi qu'il qualifiait les bibelots coûteux qui se vendaient dans ce magasin renommé que nous pourrions saluer comme le précurseur de notre rue de la Paix et et de notre avenue de l'Opéra.

L'énumération des articles qui se débitaient au « Petit Dunkerque » est impressionnante : petits meubles de table, appliques, flambeaux, secré- taires de voyage, thermomètres, pendules, tabatières, cages d'oiseaux, seaux à liqueurs, écrans, bagues, cachets, sacs de voyage, flacons, chaînes, girandoles, montres, vases, jouets, portefeuilles, écritoires, boucles, épées, réchauds, lunettes de spectacle et lorgnettes, boutons, colliers, lustres, salières, baromètres, plateaux, pinces à feu, bracelets, éteignoirs, sacs à ouvrage, pommes de canne, moutardiers, couteaux, étuis, pendants d'oreilles,

XIV PRÉFACE

bonbonnières, ciseaux, clefs de montre, bourses, tablettes et souvenirs (qui sont des tablettes sur lesquelles on écrivait ce que l'on voulait se rappeler)... Les matières les plus diverses étaient employées dans la fabrication de ces articles de haut goût : or, argent, brillants, pierres de couleurs, acier, cristal, émail, écaille, bronze, stuc, bois, laque, tôle vernie, strass, verre, papier mâché, etc..

Bien des fois, dans Les Accessoires du Costume et du Mobilier, revient le nom de Granchez, tant le « Petit Dunkerque » a tenu de place dans la vie élégante et facile de l'époque charmante dont Talleyrand a pu dire que « ceux qui ne l'ont pas connue n'ont pas su ce que c'est que la douceur de vivre ». Granchez a été véritablement à la tète du commerce de luxe pendant le temps qui a précédé la Révolution, et M. Henry D'Allemagne ne lui marchande pas une réclame posthume dont sa gloire bénéficiera largement. D'ailleurs, de la diversité, de la richesse, du mérite artistique des articles qui se trouvaient au « Petit Dunkerque » et du succès qu'ils obtenaient, il tire une leçon : c'est que les Français, particulièrement les Parisiens, ont été de tout temps « des gens de goût, aimant les belles choses, sachant les appré- cier et ayant le courage de les payer à leur juste valeur ».

La « juste valeur » de ces beaux articles pour les petits seigneurs et les grandes dames était fort élevée. Ceux qui seraient tentés de croire qu'aux siècles passés il en coûtait peu de mener une existence brillante et fastueuse devront bien revenir de leur erreur quand ils liront les chiffres que cite M. Henry D'Allemagne.

En voici quelques-uns, empruntés précisément aux avis publiés par le propriétaire du « Petit Dunkerque » qui, avec l'art de savoir faire, possédait si bien l'art de faire savoir :

« Tabatières et flacons en or de couleur renfermant un carillon jouant trois airs différents, depuis 30 jusqu'à 50 louis.

« Ecritoires en laque garnie de mathématiques d'or, 600 livres.

« Lunettes de spectacle et lorgnettes en or émaillé en gris et bleu, 900 et 432 livres.

« Lustres en strass, depuis 900 livres jusqu'à 1100.

« Pendules dorées, 1.320 livres. »

Le livre-journal de Lazare Duvaux : Les achats de Mme de Pompadour. En remontant un peu plus haut, on trouve dans le « Livre-Journal » que tenait un autre marchand de curiosités, également à la mode, Lazare Duvaux, qui comptait Mme de Pompadour parmi ses meilleurs clients, les prix suivants payés, pour des tablettes souvenirs, par la favorite de Louis XV :

PRÉFACE XV

« 17 mars 1753. Une tablette en pierre rose, montée en or, 1.008 livres.

« 10 décembre 1755. Une tablette de deux plaques d'agate d'Orient, montée à jour en or émaillé, 62 louis » (1.488 livres).

Sur ce même « Livre-Journal » de Lazare Duvaux, M. Henry D'Alle- magne a relevé les prix que voici, payés par Mme de Pompadour pour des « navettes à frivolités », ces petits instruments que les femmes emportaient avec elles et dont, afin de se donner une contenance et occuper leurs mains, elles se servaient pour faire des nœuds de filet :

« 4 septembre 1753. Une navette d'or à moulures avec des branchages émaillés, portant des cornalines en cerises, 570 livres.

« 22 mai 1754. Une navette d'acier damasquiné, 550 livres.

« 7 novembre 1754. Une navette d'or émaillé à rubans, 090 livres.

« 1er janvier 1757. - Une petite navette d'or tout à jour et ciselée, 336 livres. »

Lazare Duvaux vendit à Mme de Pompadour des « manches de couteaux de porcelaine en vert peints à guirlande », qu'elle paya 24 livres pièce, et une « lanterne à six pans en bronze doré d'or moulu, de quatre pieds et demi de haut sur trente pouces de diamètre, garnie de ses glaces et chandeliers » qui lui coûta 4.300 livres.

Mme de Pompadour était une bonne cliente pour Lazare Duvaux, mais il ne lui dut pas que des achats avantageux. On peut raisonnablement penser que, plus d'une fois, elle lui donna des commandes qui furent pour elle l'occasion d'exercer son influence toute-puissante sur la mode ou plus exac- tement sur l'art dans la mode. Les moralistes continueront à la traiter sévè- rement et les historiens à juger sans indulgence son action politique, mais les artistes se montreront plus tendres à son égard : sa mémoire trouvera grâce devant eux parce qu'elle a compris, aimé, encouragé et protégé les arts, qu'elle a soutenu et favorisé ceux qui s'y adonnaient, qu'elle a fortement contribué à l'avancement de l'art français dans la voie de l'élégance et du bon goût, qu'elle a, enfin, aidé à la création d'un style.

Les « Annonces, affiches et avis divers » au xvme siècle. La lecture des feuilles d'Annonces, Affiches et Avis divers, à la rubrique des objets perdus, a procuré à M. Henry D'Allemagne pour le xvme siècle, beaucoup de renseignements sur les articles à la mode. En ce temps déjà, il se perdait beaucoup de bijoux ; peut-être ceux et celles qui les avaient oubliés ou égarés ne voyaient-ils pas encore, comme aujourd'hui, un moyen de publicité personnelle dans l'avis qu'ils do nnaient au public de leur infortune ; peut-être leurs annonces avaient-elles un caractère de sincérité ; quoi qu'il en soit, nous savons, par ces informations, qu'en telle ou telle année il était

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de bon ton de porter tel ou tel bijou. Par exemple, dans la feuille intitulée précisément Annonces, Affiches et Avis divers, M. Henry D'Allemagne a découvert que le 26 décembre 1764 il avait été perdu « un sac de Marly dans lequel il y avait une navette de Burgos montée en or » ; le 4 février 1767, « une navette d'or de couleur, à jour, garnie de soie mordorée, dans un sac de taffetas couleur de rose, brodé en argent »; le 11 mai de la même année, « une navette d'or travaillée à jour, dont le milieu représente les attributs de l'Amour en or de plusieurs couleurs ».

Si nous ne savions pas l'engouement que, vers le temps indiqué, on avait pour l'usage de la navette, ces simples avis nous l'apprendraient, de môme que nous apprendrions de quelle faveur jouissaient, à la môme époque les étuis de galuchat peau de requin ou de raie travaillée, ainsi nommée du nom du gainier qui avait inventé un procédé pour la préparer et la teindre par des annonces tirées de la même feuille portant à la connaissance de ses lecteurs : le 6 mai 1765, la perte d' « un étui en galuchat servant de trousse » ; le 2 juin de la même année, celle d' « un étui de galuchat vert renfermant une montre émaillée » ; le 10 avril 1772, celle d' « un crayon d'or dans un étui de galuchat à charnière et bouton d'or ». Le Journal général de Paris offrait des récompenses, le 25 avril 1780, à qui rapporterait à sa propriétaire « un souvenir d'écaillé vert, garni en or à jour avec médaillon en camayeu et deux tablettes d'ivoire dans un sac de peau » et, le 3 avril 1781, à qui rapporterait de même à son propriétaire des « tablettes d'argent, couvertes en écaille, dans lesquelles sont trois portraits en miniature », et voilà qui nous montre quel succès avaient, dans les premières années du règne de Louis XVI, les tablettes et les souvenirs.

L'acier poli : sa vogue a la fin du xvme siècle et au commence- ment du xixe. Les accessoires du costume et du mobilier en acier poli, dont l'usage a été si répandu à la fin du xvme siècle et au commencement du xixe, sont devenus rares pour cette raison, fait remarquer l'auteur, que « lorsqu'un objet en acier poli, surtout quand il est garni de perles taillées à facettes, commence à être oxydé, il n'y a plus aucun remède et il est impos- sible, même au moyen d'un polissage énergique, de rattraper l'ancien poli, à moins de sacrifier complètement la taille des perles à facettes ».

On lira donc avec un intérêt tout particulier les détails que donne M. Henry D'Allemagne sur cette mode de l'article en acier, importé d'Angle- terre au milieu du xvme siècle, adopté aussitôt par suite de l'anglomanie qui, pour lors, travaillait l'aristocratie et la haute bourgeoisie françaises et y développait, dans une certaine mesure, le goût de la simplicité, enfin per- fectionné à Paris même par un fabricant nommé Dauffe, établi au quartier

LES ACCESSOIRES DU COSTUME ET DU MOBILIER

PI. IV

Bijoux en cheveux tressés montés en or.

Echantillons des divers genres de travaux qu'on peut ainsi fabriquer, xix6 siècle.

(Collection H.-R. D'Allemagne.)

PRÉFACE XVII

Saint-Antoine. Dauffe livrait au public des boutons d'habit, des boucles, des chaînes de montres, des plaques de ceintures, des bagues, des ganses de chapeau, etc. En 1787, il faisait annoncer par le Journal de Paris qu'il venait d'exécuter « une garniture de boutons pour habit, à jour, garnis de perles entières à vis, tout en acier... du poli le plus vif et le plus délicat » et pouvant « soutenir la comparaison avec ce qui est sorti de plus parfait des manufac- tures anglaises ».

Abandonnée pendant la période sombre de la Révolution, la vogue des bijoux en acier travaillé reparut sous le Consulat et le Journal des Dames et des Modes du 20 messidor an XII (9 juillet 1804) put écrire : « En costume d'étiquette, l'acier reprend la plus grande faveur et c'est avoir une mise recherchée que de porter une épée, une chaîne de montre et une agrafe de chapeau en acier taillé en pointe de diamant. Un assortiment pareil dans le fin est plus élégant et peut-être plus cher que s'il était en or ».

Aux expositions des Produits de l'industrie française de 1819 et de 1823, ancêtres de nos expositions, l'acier travaillé à destination de parure tenait une place très brillante, si brillante que pour celle de 1819, le rapporteur du jury disait, à propos de la présentation faite par une des maisons exposantes : « Il paraît impossible d'atteindre une plus grande perfection ; elle est même portée aujourd'hui au point que l'étranger tenterait vainement d'introduire la bijouterie d'acier en France, tant la différence des prix et du fini est en notre faveur ; aussi, plusieurs riches commandes ont-elles été faites dans nos aciéries pour l'Italie, l'Espagne, la Prusse, la Russie et même l'Angle- terre ». Ce même rapport, toujours à propos de cette maison, qu'il louait pour la modération de ses prix, « au-dessous du cours de toutes les fabriques étrangères », non moins que pour la beauté des objets sortis de ses ateliers, fournissait d'utiles indications sur le côté commercial de l'industrie de l'acier travaillé : « Il est à remarquer que, si les aciers anglais sont employés concur- remment avec ceux de France, le kilogramme d'acier superfin étant au prix de 3 francs et la plus riche parure complète en employant, à raison du déchet, pour une valeur de 6 francs ou 2 kilogrammes environ, le kilogramme d'acier de parure terminée, polie et parachevée s'exporte au prix de 5 à 6.000 francs. »

En quoi pouvait consister cette parure complète ? Le Miroir des Modes nouvelles du 11 janvier 1789, année la bijouterie d'acier faisait fureur jusqu'à avoir pris la place de celle d'or et d'argent, énumère ainsi les articles en acier travaillé qu'un élégant, voulant être dans le bon ton, devait porter sur son costume : boutons des jarretières, de la culotte, boucles des souliers, ganse du chapeau, chaîne (de montre d'or) d'acier garnie de breloques d'acier.

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« Jusqu'en 1830, écrit M. Henry D'Allemagne, on porta des parures complètes en acier poli et taillé à facettes, des broches, des fleurs, des boucles que l'on fixait au chapeau ou qu'on passait dans un ruban porté autour du cou ou du bras, en guise de bracelet, des petits sacs de dames appelés gibe- cières, des bourses longues et souples à coulant, des châtelaines auxquelles étaient suspendues toutes sortes de breloques également en acier : clefs de montres, cachets, tablettes, etc..

« A côté des bijoux en acier ordinaires d'un prix abordable même aux petites bourses, on faisait de véritables bijoux d'un très grand prix : des boutons d'habits, des boucles de souliers, des gardes d'épées. »

De tant d'objets précieux par leur élégance et par leur fini, de tant de charmants bijoux qui brillaient de tout l'éclat qu'ils empruntaient à la lumière se jouant sur le poli de l'acier travaillé, que reste-t-il ? Quelques spécimens recueillis au hasard des recherches par des amateurs passionnés de bibelots curieux et rares et conservés dans leurs collections ou dans des musées enrichis par eux, amateurs au premier rang desquels il faut citer M. Le Secq des Tour- nelles ! L'abondante et remarquable illustration réunie par M. Henry D'Alle- magne permettra d'estimer la variété, la finesse de cette bijouterie tombée dans un complet oubli, après avoir connu la gloire d'un succès prodigieux.

Les bijoux en fonte malléable dite « fonte de Berlin ». Ce fut aussi la destinée de la « fonte de Berlin », dont M. Henry D'Allemagne nous conte l'histoire, renouvelée, d'ailleurs, d'une initiative française.

« Quand, dit-il, en 1789, le Gouvernement fit appel à la générosité des citoyens pour la liquidation de la dette nationale, les dons patriotiques furent à l'ordre du jour ; c'était à qui se dépouillerait le plus vite de ses curio- sités, de ses bijoux, de ses boucles d'or ou d'argent pour les envoyer à l'Assem- blée nationale... C'est sur la proposition du député d'Ailly, que l'Assemblée nationale émit un vote exigeant que tous les députés abandonnassent leurs boucles d'argent au profit des Caisses du Trésor. Le 22 novembre 1789, la séance de l'Assemblée s'ouvrit par le don patriotique qu'avait fait le maréchal de Maillé de ses boucles d'or ».

Et voici l'origine de la vogue de la fonte dite « de Berlin », telle que l'expose M. Henry D'Allemagne : « En 1813, la Prusse, pour réapprovisionner son trésor anéanti par les guerres qu'elle avait soutenues contre Napoléon Ier, reprit l'idée de l'Assemblée nationale française et, après la bataille de Leipzig, alors qu'elle voyait poindre la libération de son territoire, elle engagea ses citoyens à verser au Trésor tous leurs objets précieux. Enflammées par l'enthousiasme national, les dames allemandes remirent au Gouvernement

LES ACCESSOIRES DU COSTUME ET DU MOBILIER

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Bijoux en fonte de Berlin : Collier, fermoirs, bracelets, boucles d'oreilles, briquet. 1813-1S15

(Collection H.-R. D'Allemagne.)